Si je suis bien d'accord avec ce que tu avances pour Usual Suspects, dire que Mystic River est une daube est totalement faux, c'est un des meilleurs films de Sean Penn et je ne parle même pas de Marcia Gay Harden ou de Kevin Bacon
J'ai été affolé par la platitude des personnages, et un traitement psychologique à la fois pompeux et fade... l'impression qu'on me confisquait le sens en explicitant tout, tout le temps. Quand l'industrie américaine s'essaie à la psychologie, ça verse régulièrement dans la sociologie, et là, dans ce film, nous n'avons effectivement que des "types" dont on enfonce le clou : tout va dans le même sens, et cette univocité est vraiment pesante, tout le long.
Remonte-toi le film dans ta tête et regarde le nombre de clichés sur lequel il repose (ne serait-ce que ce qui relève de la psychanalyse : rien que de la bouillie de vieil étudiant, de la trace dans le ciment au dialogue final). Franchement, je viens de me remater 'Scènes de la vie conjugale', et ça tranche, niveau psychologie ! Lui arrive merveilleusement à faire cohabiter cinéma et psychologie, et avec une économie de personnages et d'action stupéfiante. C'est assez rare, quand ça réussit. Et il y a surtout de très bons films qui ne s'y essaient pas, on ne leur en veut pas.
Pour ce qui est de Sean Penn, c'est je suis d'accord un excellent acteur. Mais je le trouve bien meilleur dans '21 grams'.
Dans les films que t'as cité, y en a par contre une de belle scène de daube : celle de la dynamite dans Pierrot le fou, rarement vu plus convenue comme scène (malgré Belmondo, Delerue et Coutard) (non seulement ce film est boursouflé de prétentions et complètement toc mais en plus, sans ce réalisateur à deux balles et une Anna Karina en demi-teinte, il y aurait assurément eu moyen de faire un putain de film... )
Je suppose que "réalisateur à deux balles" c'est une provocation, parce que si tu aimes Raoul Coutard et Georges Delerue, tu peux difficilement ne pas aimer Godard : Le Mépris, Pierrot le fou... Il sont là à chaque fois, et ils n'auraient pas mis leur talent au service d'un baratineur.
Que Godard soit devenu un vieux gâteux qui feint l'ermitage pour mieux se laisser aller à sa nature bavarde et vaniteuse quand l'occasion se présente, je suis le premier à le reconnaître, mais traiter 'Pierrot le fou de navet', et sa scène finale de "scène convenue", ça me dépasse un peu : je ne sais pas si "putain de film" prend pour référence n'importe quel Bebel, mais c'est précisément l'acharnement contre les genres en place qui me fascine dans 'Pierrot-le-fou', et c'est précisément parce que Godard a utilisé ses stars (et qu'ils les a pris pour ce qu'ils étaient : des cons. C'est le cas pour Bardot dans Le Mépris, c'est le cas pour Belmondo dans Pierrot le fou), parce qu'il les a clairement "contre-employés" que ces deux films sont des réussites ovniesques. Il n'y a rien de plus emmerdant qu'un film reposant tout entier sur une intrigue : les films que je préfère, personnellement, sont ceux qui ne me font pas l'insulte de me donner ce que j'attends. Et Godard réussit souvent à déjouer brillamment les attentes. Voilà.