Bourgoi égris du zezi, Tröne ?
Beux-du egzbliguer ze bassache ?
Nul ne peut évidemment véritablement savoir ce qu'a choisi le Karh à la seconde de sa mort, mais la possibilité d'assister à une mort est un événement de première importance pour les Exégètes Karhs. Ce qu'ils lisent sur le visage du Karhs occupé à lire son crâne est cette joie ou ce désespoir perçu et réfléchi par le mourant. L'expression de son propre crâne en sera peut-être déterminée secrètement, par la suite, si bien qu'il se développe un véritable marché noir du crâne. Les exégètes corrompus laissent se développer l'idée vraie ou fausse selon laquelle certains crânes portent véritablement la joie ou le désespoir que leur propriétaires ont perçus et ressentis au plus profond au moment de la mort, face à un autre crâne. Dès lors, les Karhs porteurs des crânes des paradisiens multiplieraient leurs chances. Bernard Thévenet n'a pas manqué, dans ce contexte, de fasciner les Karhs, qui ont attendu manifestement sa mort pour expérimenter une configuration toute nouvelle dans leur culte et vertigineusement prometteuse : observer la mort d'un incroyant, et récupérer son crâne, qui casserait ainsi la récurrence de la croyance et de ses effets sur les destinées posthumes des Karhs. Bernard Thévenet n'a pas manqué de percevoir la situation, ce que reflète son journal de façon déchirante, mais il semble même qu'il ait eu à un moment intérêt personnel à tenter d'adhérer au culte du crâne. Mais le dogme du choix reste central, dans le doute, entretenu par les générations de philosophes Karhs hostiles à toute forme de fatalisme ou de pré-détermination.